Roberto Palomba - Chair & Champagne

Quelle est votre approche lors de la création de vos produits?

Lorsque je dois expliquer mon travail à des amis qui ne sont

pas dans le domaine de l’art, je leur dis: je fais ce que l’arbre

ne produit pas, c’est-à-dire concevoir ce que la nature ne nous

offre pas. D’autre part, quand je crée, je dois sentir que je

réponds à des questionnements. Mon travail consiste à écouter

les gens, les comprendre et créer en fonction de leurs besoins.

 

Qu’est-ce qui vous inspire?

J’appellerais ceci une sensation plutôt qu’une inspiration.

Je suis un ancien designer, je connais mon boulot et j’ai une

totale confiance en moi. Je voyage un peu partout, j’observe

et j’écoute beaucoup d’histoires. Je respire ce que je vis, c’est

comme si j’enregistrais tout dans mes émotions, mon esprit et

mon coeur, pour les ressortir par la suite à travers mes créations.

Et plus je grandis en âge, plus j’ai des histoires à raconter.

 

Vous portez plusieurs casquettes: vous êtes architecte,

designer, directeur artistique, artiste… Quel est le lien?

La curiosité. Je suis très curieux… Je fais toujours des

recherches. Je crois que si j’avais trois autres vies elles

seraient déjà toutes remplies. Je suis toujours curieux de

nouvelles découvertes. Notre seul ennemi est le temps et

c’est la raison pour laquelle je ne porte jamais de montre.

Nous avons inventé la philosophie, la science, l’art, la

littérature et tout ce que l’on fait c’est en vue de combattre

le temps, sinon on serait juste en train de suivre le courant

de notre nature humaine.

 

Vous avez toujours travaillé en collaboration avec votre

femme, Ludovica. Comment trouvez-vous un équilibre dans

le travail?

Ma femme est mon patron. Elle affirme. J’exécute. Non,

je plaisante, nous sommes toujours dans l’échange, c’est

ainsi que nous doublons les opportunités. On se complète

en quelque sorte. Elle est une architecte

très douée. Je suis plutôt dans le design.

Je suis très curieux, elle est très forte dans

l’organisation. En fin de compte nous

sommes une personne dans deux corps

différents.

 

Quel est le but de votre visite à Beyrouth?

Je suis à Beyrouth pour faire la promotion de

la marque de design Driade avec laquelle j’ai

une nouvelle collaboration. Je fais partie de

son groupe de création et suis en charge de

la conception stylistique (le titre de directeur

artistique ne me convient pas beaucoup). Driade

est une très grande marque, très importante

internationalement, et nous sommes en

train de réinventer son identité pour le futur;

nous avons donc réalisé plusieurs projets de

design cette année. Ce sera comme une révolution,

pour la faire briller de nouveau.

 

Parlez-nous de la fameuse chaise Sissi que vous avez créée

récemment?

Cette chaise est très riche en symboles. Premièrement

nous l’avons fabriquée comme un objet très léger et très

simple. Nous avons donc fait en sorte qu’il y ait beaucoup

de trous d’air, beaucoup de vides et qu’elle soit à la fois très

confortable et très fine. Jeune et fraîche, elle me rappelle les

anciennes chaises autrichiennes «démocratiques» qui étaient

fabriquées pour le peuple. C’était intéressant pour moi de

travailler avec le plastique, le matériau «démocratique»

de notre temps, pour qu’elle soit accessible à tout le

monde. Tous les détails de la chaise sont travaillés très

minutieusement, pour qu’elle soit élégante et surprenante

à la fois. Et bien sûr, dans le dossier, il y a cette image

d’union dans les deux anneaux entrecroisés, qui sont peutêtre

aussi le symbole de l’infini. On pourrait même y voir

des fleurs, ou une chaîne qui se multiplie. J’aime l’idée que

tout est connecté. Cette chaise me ressemble et représente

beaucoup ce que je suis.

 

Pourquoi l’avoir appelée Sissi? Est-ce une allusion à

l’impératrice d’Autriche?

Oui, Sissi était bien sûr cette impératrice très proche du peuple

et très humaine. Une figure très romantique de son siècle.

 

Quel est votre plus grand défi durant toute la procédure de

création d’un produit?

Pouvoir dégager une émotion que les gens partagent. Si je

suis capable de créer une émotion positive à chaque fois que

quelqu’un est en contact avec mon design, cela veut dire

que j’ai réussi à faire quelque chose de bien dans la vie de

l’autre et que j’ai atteint mon objectif.

 

Comment percevez-vous l’espace? Et comment y intégrezvous

votre produit?

Je suis architecte, et cela fait partie de ma démarche. Je crée,

je coupe les matériaux et je les insère dans un espace. Je

fais donc en sorte de les adapter à leur environnement. Ça

fait partie du design, puisque les deux réflexions

(architecture et design) fusionnent.

 

Quels sont vos projets?

Je travaille sur plusieurs en ce moment,

et en particulier sur le développement et

l’élaboration de Driade. Par ailleurs, ma

femme et moi sommes sur des projets

architecturaux tels que des maisons privées,

de grands appartements, quelques villas, et

sur un vaste programme de rénovation dans

le sud de l’Italie qui comprendra à la fois un

hôtel et un restaurant. J’ai aussi un grand

projet, secret jusqu’à présent, mais que

vous découvrirez dans deux ans.