23.5.2017
Roberto Palomba - Chair & Champagne
Quelle est votre approche lors de la création de vos produits?
Lorsque je dois expliquer mon travail à des amis qui ne sont
pas dans le domaine de l’art, je leur dis: je fais ce que l’arbre
ne produit pas, c’est-à-dire concevoir ce que la nature ne nous
offre pas. D’autre part, quand je crée, je dois sentir que je
réponds à des questionnements. Mon travail consiste à écouter
les gens, les comprendre et créer en fonction de leurs besoins.
Qu’est-ce qui vous inspire?
J’appellerais ceci une sensation plutôt qu’une inspiration.
Je suis un ancien designer, je connais mon boulot et j’ai une
totale confiance en moi. Je voyage un peu partout, j’observe
et j’écoute beaucoup d’histoires. Je respire ce que je vis, c’est
comme si j’enregistrais tout dans mes émotions, mon esprit et
mon coeur, pour les ressortir par la suite à travers mes créations.
Et plus je grandis en âge, plus j’ai des histoires à raconter.
Vous portez plusieurs casquettes: vous êtes architecte,
designer, directeur artistique, artiste… Quel est le lien?
La curiosité. Je suis très curieux… Je fais toujours des
recherches. Je crois que si j’avais trois autres vies elles
seraient déjà toutes remplies. Je suis toujours curieux de
nouvelles découvertes. Notre seul ennemi est le temps et
c’est la raison pour laquelle je ne porte jamais de montre.
Nous avons inventé la philosophie, la science, l’art, la
littérature et tout ce que l’on fait c’est en vue de combattre
le temps, sinon on serait juste en train de suivre le courant
de notre nature humaine.
Vous avez toujours travaillé en collaboration avec votre
femme, Ludovica. Comment trouvez-vous un équilibre dans
le travail?
Ma femme est mon patron. Elle affirme. J’exécute. Non,
je plaisante, nous sommes toujours dans l’échange, c’est
ainsi que nous doublons les opportunités. On se complète
en quelque sorte. Elle est une architecte
très douée. Je suis plutôt dans le design.
Je suis très curieux, elle est très forte dans
l’organisation. En fin de compte nous
sommes une personne dans deux corps
différents.
Quel est le but de votre visite à Beyrouth?
Je suis à Beyrouth pour faire la promotion de
la marque de design Driade avec laquelle j’ai
une nouvelle collaboration. Je fais partie de
son groupe de création et suis en charge de
la conception stylistique (le titre de directeur
artistique ne me convient pas beaucoup). Driade
est une très grande marque, très importante
internationalement, et nous sommes en
train de réinventer son identité pour le futur;
nous avons donc réalisé plusieurs projets de
design cette année. Ce sera comme une révolution,
pour la faire briller de nouveau.
Parlez-nous de la fameuse chaise Sissi que vous avez créée
récemment?
Cette chaise est très riche en symboles. Premièrement
nous l’avons fabriquée comme un objet très léger et très
simple. Nous avons donc fait en sorte qu’il y ait beaucoup
de trous d’air, beaucoup de vides et qu’elle soit à la fois très
confortable et très fine. Jeune et fraîche, elle me rappelle les
anciennes chaises autrichiennes «démocratiques» qui étaient
fabriquées pour le peuple. C’était intéressant pour moi de
travailler avec le plastique, le matériau «démocratique»
de notre temps, pour qu’elle soit accessible à tout le
monde. Tous les détails de la chaise sont travaillés très
minutieusement, pour qu’elle soit élégante et surprenante
à la fois. Et bien sûr, dans le dossier, il y a cette image
d’union dans les deux anneaux entrecroisés, qui sont peutêtre
aussi le symbole de l’infini. On pourrait même y voir
des fleurs, ou une chaîne qui se multiplie. J’aime l’idée que
tout est connecté. Cette chaise me ressemble et représente
beaucoup ce que je suis.
Pourquoi l’avoir appelée Sissi? Est-ce une allusion à
l’impératrice d’Autriche?
Oui, Sissi était bien sûr cette impératrice très proche du peuple
et très humaine. Une figure très romantique de son siècle.
Quel est votre plus grand défi durant toute la procédure de
création d’un produit?
Pouvoir dégager une émotion que les gens partagent. Si je
suis capable de créer une émotion positive à chaque fois que
quelqu’un est en contact avec mon design, cela veut dire
que j’ai réussi à faire quelque chose de bien dans la vie de
l’autre et que j’ai atteint mon objectif.
Comment percevez-vous l’espace? Et comment y intégrezvous
votre produit?
Je suis architecte, et cela fait partie de ma démarche. Je crée,
je coupe les matériaux et je les insère dans un espace. Je
fais donc en sorte de les adapter à leur environnement. Ça
fait partie du design, puisque les deux réflexions
(architecture et design) fusionnent.
Quels sont vos projets?
Je travaille sur plusieurs en ce moment,
et en particulier sur le développement et
l’élaboration de Driade. Par ailleurs, ma
femme et moi sommes sur des projets
architecturaux tels que des maisons privées,
de grands appartements, quelques villas, et
sur un vaste programme de rénovation dans
le sud de l’Italie qui comprendra à la fois un
hôtel et un restaurant. J’ai aussi un grand
projet, secret jusqu’à présent, mais que
vous découvrirez dans deux ans.